WINTZENHEIM.HISTOIRE

Santé : les sages-femmes


Les sages-femmes de Wintzenheim (1850-1950)

Depuis l’origine des temps, accoucher est une affaire de femmes : celles qui accouchent et celles qui leur apportent aide et soutien. De fait, on ne sait pas grand-chose sur la manière d’accoucher au fil des siècles. A l’exception des naissances royales, les femmes accouchaient sur des paillasses près du foyer, les plus humbles sur la paille de l’étable. A partir du XVème, les sages-femmes doivent suivre un apprentissage et prêter serment devant les autorités sous la stricte surveillance de l’Eglise. Pendant la période révolutionnaire les premières écoles de sages-femmes sont créées, dont celle de Colmar, à l’initiative du Dr Morel (1804).

Les élèves, proposées par le maire au vu d’un certificat scolaire attestant leur degré d’instruction, suivent des cours théoriques et pratiques. La commune prend en charge le coût de la formation et l’achat du matériel nécessaire* ; en retour, la sage-femme diplômée vient s’installer dans sa commune d’origine. Elle prend en charge les femmes de la commune, qu’elles soient aisées ou indigentes, déclare la naissance à l’état civil pour les mères seules et également en cas d’enfant mort-né. Ce sont elles aussi qui auront le privilège, dans nombre de familles alsaciennes, de porter l’enfant sur les fonts baptismaux !

Selon un relevé des professions médicales en 1856, Wintzenheim compte deux sages-femmes pour 3796 habitants : Bissinger Marie-Anne, (brevet de capacité en 1837) et Dietrich Marie-Anne (brevet de capacité en 1846). En 1906, l’une des sages-femmes, Antoinette Glass Glassnetta ») souhaite créer une mini-maternité dans la maison de ses parents au 196 Hauptstrasse (aujourd’hui 101 rue Clemenceau) permettant aux femmes qui le souhaitent, d’accoucher dans de meilleures conditions. Elle obtient l’autorisation préfectorale d’accueillir jusqu’à 5 femmes. La Guerre de 14-18 et le retour à la législation française mettent fin à cette expérience. Pendant la Seconde Guerre, Parmentier Marie et Wagner Cécile seront habilitées à exercer leur profession en date du 4 février 1943.

Mme Wagner ayant exercé à Strasbourg, s’installera par la suite à Turckheim où elle deviendra une icône incontournable de la maternité locale et de beaucoup de femmes des environs.

A partir de la seconde moitié du XXème siècle, les accouchements à l’hôpital ou en clinique deviennent la règle.
Aujourd’hui la sage-femme est intégrée dans une équipe de soignants, mais elle reste cette « sage » femme qui accompagne la future maman dans l’accueil de son enfant.

* A cette époque, beaucoup de femmes accouchent installées sur une chaise d’accouchement appartenant à la commune. Il ne reste que peu de chaises d’accouchements en Alsace dont l’une se trouve au musée alsacien à Strasbourg et une autre à la Société d’Histoire des Hôpitaux Civils de Colmar

Quelques sages-femmes de Wintzenheim

Dietrich Marie-Anne(1824-??)
Bissinger Marie-Anne
Meyer Joséphine épouse Lichtlé (1863-1924)
Ottmann Virginie épouse Kling (1873-1941)
Glass Antoinette célibataire (1875-1959)
Rumbler Cécile épouse Wagner (1897-1972)
Buecher Marie épouse Hanser, Vve Parmentier (1905-2000) 

Sources :
- Tous nos remerciements à Mmes Charlotte Miesbach et Angèle Scherberich pour leurs témoignages
- Archives Municipales de Wintzenheim
- Archives Départementales du Haut-Rhin
- "Naitre en Alsace" - Mémoire présenté à l’école de Cadres des Sages-femmes par Mme Gangloff-Schmitt 1986-1987

Marie-Claude ISNER, Société d'Histoire de Wintzenheim


Photothèque

Wintzenheim*

Sages-Femmes 01

Cécile Rumbler
assise au milieu du premier rang
en section élèves sages-femmes
à Strasbourg
vers 1920-1925

(collection Angèle Scherberich, née Wagner)

Wintzenheim

Sages-Femmes 02

Cécile Rumbler
debout à gauche
en section élèves sages-femmes
à Strasbourg vers 1920-1925
dans la pouponnière avec les bébés.

Les nourissons ne sont pas dans des berceaux individuels
mais ensemble dans une espèce de grand bac.

(collection Angèle Scherberich, née Wagner)

Wintzenheim

Sages-Femmes 03

La sage-femme Cécile Wagner, née Rumbler
à la sortie du baptème devant l'église de Turckheim.
Elle tient le bébé, entourée du papa et de la maman.
Le parrain et la marraine se tiennent à l'arrière.

(collection Angèle Scherberich, née Wagner)

Wintzenheim

Sages-Femmes 04

Octobre 1942 - Devant le 108 rue Clemenceau.

Baptême de Christian Tag en calèche.

Adultes de gauche à droite :
le cocher Charles Haeffelin, la tante Valentine Tag,
la sage-femme Wagner qui tient le bébé,
le papa Georges Tag.

Enfants : la fille de la sage-femme et Marie-Antoinette Tag.
Derrière la calèche : Denise Haebig.
A droite de la photo : Annette Bissinger (épouse Bricola).

(collection Hélène Freydrich-Haeffelin)

Wintzenheim

Sages-Femmes 05

15 avril 1917 - Sur le perron de l'église Saint-Laurent
Baptême de Louis Koch (fils de Albert Koch)
né le 12.04.1917

De gauche à droite :
La sage-femme : Mlle Glass qui tient le bébé
La marraine : Mlle Lucie Humbert
Le parrain : Louis Bouillon

(Photothèque SHW 106)

Sages-Femmes 06

Chaise d’accouchement
Hurtigheim, 1837
Musée Alsacien de Strasbourg

Façonnée en 1837 à partir de bois fruitier et ornée d’un vase de fleurs, ou Maikrug, symbole de fécondité, cet objet est un modèle très délicat de chaise d’accouchement. Propriété de la sage-femme Anna Willig qui exerçait à Hurtigheim, cette chaise présente des accoudoirs démontables et un dossier repliable. En effet, elle était transportée par la sage-femme au domicile de ses patientes, où se déroulait l’accouchement. Pour le trajet, elle était placée dans un sac de cuir. Pour mettre son enfant au monde, la femme parturiente est ainsi assise, face à la sage-femme qui l’encourage, la guide, et peut, s’accroupissant, aider à sortir le bébé.

La leçon d'alsacien : Hebàmm ou Hewàmm = sage-femme

Un ami lecteur me demande : « Pourquoi dit-on en alsacien Hebàmm ou Hewàmm pour sage-femme ? D’où vient ce terme ? » Il faut remonter à la forme du moyen-haut allemand (1050-1500) hebeamme, au sens de sage-femme, littéralement la nourrice, die Amme, qui soulève, heben, le nouveau-né, s nèigeborene Kìnd, au moment où il vient au monde, wenn’s uf d Walt kommt. La variante Hewàmm est due à un affaiblissement articulatoire, le passage de b à w, fréquent dans certaines circonstances, comme en position intervocalique (entre deux voyelles) : ich lab, mìr lawe, je vis, nous vivons. Il est aussi une des lignes de partage (isoglosse) entre le haut alémanique parlé dans le Sundgau méridional (au sud d’une ligne Sierentz-Ferrette) et le bas alémanique comme l’illustre l’exemple : labe/lawe, vivre. En revanche, Hemàmme, qui circule dans le coin de Morschwillerle-Bas, est carrément une déformation amusante de Hebàmme, qui du coup jette aux oubliettes l’étymologie de ce geste ancestral de la sagefemme qui consiste à soulever le nouveau-né : hochhebe (haut alémanique) ou hochhewwe (bas alémanique). Le cordon ombilical est coupé, d Nawwelschnüer ìsch duregschnìtte, et la mère, d Màmme, ou la nourrice, d Sügàmme, peuvent donner le sein au bébé affamé, känne ìm hungrige Bubbela d Bruscht ga. Notons au passage que Sügàmme, composé de süge, sucer, et Àmme, nourrice, est bien plus évocateur que Pflag(e) müeter ou « nounou ». Le lait maternel, d Müetermìlch, ou Müetermìlich est sans doute préférable au biberon, der Schoppe, affublé de sa tétine, der Zulli ou s Zullela, qui se dit Nùlli à Colmar. Eh oui, zulle signifie également sucer, tout comme lulle ou nùlle (Colmar), ce qui nous renvoie à la sucette, s Zullstangela, peu à peu poussé hors du champ linguistique alsacien par l’emprunt Süsettla. Question aux psychologues : jusqu’à quel âge un enfant peut-il sucer son pouce, àm Düme zulle, lulle, nùlle, sans se faire traiter de bébé, Bubbela, par ses camarades ? J’observe çà et là qu’un nombre non négligeable de grandes personnes, à l’instar des nourrissons, Wìckelkìnder, semblent être attirées par les hochets, d Schatterla. Le hochet est, au sens figuré, cette chose futile qui contente et console l’esprit tourmenté. Je m’aperçois que d’aucuns les agitent comme des bannières devant les yeux écarquillés de leurs sujets, gwìssi schwìnge se wie Bànner vor de ufgsperrte Auige vo ìhre Untertàne. Et de me demander si cette attirance-là ne serait pas une forme de régression collective ? War dàs nìt e Form vo kollektivem Ruckschrìtt ?

Edgar ZEIDLER, L'ALSACE du dimanche 27 décembre 2020


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