WINTZENHEIM.HISTOIRE

Allocutions à la Synagogue de Wintzenheim

Le 4 décembre 2018

(photo Guy Frank)

Monsieur Serge Nicole, Maire de Wintzenheim

Nous sommes réunis ce soir pour mettre à l’honneur le Grand Rabbin Nephtali Lazare Hirsch Katzenellenbogen, décédé en 1823, qui fut Grand Rabbin et Président du Consistoire Israélite du Haut-Rhin, dont le siège se trouvait alors à Wintzenheim.

L’hommage que nous rendons ce soir au Grand Rabbin Katzenellenbogen, qui sera symbolisé par le dévoilement d’une plaque commémorative, prend un sens fort, car Wintzenheim est l’une des rares communes alsaciennes où la présence juive remonte à la fin du Moyen-Âge.

Même si l’Histoire est douloureuse, le souvenir favorise une forme de résilience qui permet de mesurer le chemin parcouru.

Le judaïsme alsacien possède un caractère original, composé d’une multitude de petites communautés rurales, imposant chacune leurs propres codes.

Mais Wintzenheim est la seule ville où les Juifs pouvaient être propriétaires de leur maison, pouvaient exercer certaines professions interdites ailleurs. Il y régnait une bonne entente entre les communautés juives et chrétiennes. Les traditions de chacun y étaient respectées, chacun pouvait participer à la vie commune du bourg, et fréquenter les mêmes bancs de l’école communale. En 1784, 87 familles y étaient établies.

La communauté de Wintzenheim possédait alors toutes les structures indispensables à une vie juive authentique : une synagogue, une école israélite, et un rabbinat.

Naphtali Lazare Hirsch Katzenellenbogen est le descendant d’une grande dynastie rabbinique, remarquable érudit et auteur de sermons et ouvrages rabbiniques : il fut nommé premier Grand Rabbin et Président du Consistoire Israélite du Haut-Rhin, dont le siège trouva sa place à Wintzenheim jusqu’en 1827.

Nous gardons ce soir une pensée particulière pour toutes ces familles qui ont vécu ici avec cœur, humilité et persévérance, et qui font vivre encore cette belle synagogue, construite en 1748, et agrandie sous sa forme actuelle avec la contribution financière de la ville de Wintzenheim en 1869.

Transformée en garde-meubles pour la Préfecture, elle fut heureusement préservée des bombardements de la Seconde Guerre Mondiale.

Par cette cérémonie et cet hommage, nous affirmons notre volonté de faire vivre la mémoire de Wintzenheim, et, au-delà des drames vécus, que nous gardions tous en mémoire l’article premier de la déclaration des Droits de l’Homme : « Tous les Hommes naissent Libres et Égaux en Droit ».


(photo Guy Frank)

Docteur Elie Cohen, Président du Consistoire Israélite du Haut-Rhin

Le Grand Rabbin KATZENELLENBOGEN est né en 1750. Il est décédé à 73 ans en 1823.

Il a vécu une période historique riche en évènements. Je retiendrai trois phases : avant la révolution française, durant la révolution, et après la révolution.

A la veille de la révolution, on assiste à un développement rapide des communautés juives comme en témoigne le “dénombrement général des juifs tolérés en la province d’Alsace (10 juillet 1784). Les métiers exercés reflètent la situation d’exclusion : colporteurs, marchands de bestiaux, prêts d’argent, ce qui leur vaut de nombreuses inimitiés dans le monde paysan.

Durant la révolution, à l’annonce de la prise de la Bastille, les soulèvements populaires conduisent les émeutiers à s’en prendre à la noblesse, au clergé, mais aussi aux communautés juives obligées de fuir leurs villages.

Après la révolution, le sort des juifs s’améliore progressivement. La convocation du Grand Sanhédrin par Napoléon 1er en 1807, permet au Rabbin Katzenellenbogen, il n’est pas encore Grand Rabbin, d’y siéger comme député du Bas-Rhin. C’est Salomon LEVY de Durmenach qui représentera le Haut-Rhin.

Cette plaque commémorative nous permet de savoir qui nous avons été et participe à notre mémoire collective que les révisionnistes veulent falsifier pour rendre possible un certain passé une fois qu’il sera oublié. Les événements traumatiques pour la collectivité tendent à subir le même sort que les événements traumatiques pour l’individu : la mémoire les gomme totalement. Il faut attendre de très nombreuses années avant de les voir resurgir et enfin pouvoir en parler.

Monsieur le Maire, votre décision est un exemple que la mémoire de nos sociétés n’est pas figée une fois pour toute, mais qu’elle se transforme au fil du temps et de l’actualité.

Le choix du Grand Rabbin Katzenellenbogen, est un acte courageux et noble qui vous honore ainsi que votre conseil municipal.

Au nom du Consistoire israélite du Haut-Rhin, je vous remercie du fond du cœur pour ce moment historique.

Un grand merci à Maître Ivan GEISMAR, président d’honneur de notre consistoire, qui n’a pas ménagé son temps et ses efforts pour organiser avec vos services cette inauguration.


Le Grand Rabbin Katzenellenbogen

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